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Comment expliquer la débâcle de la Roja ?

  • Photo du rédacteur: Raphaël Pazuelo
    Raphaël Pazuelo
  • 9 déc. 2022
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 9 déc. 2022





Mardi, aux environs de 18h45, c’est une nouvelle fois la déception qui envahissait Madrid. Après avoir gagné leur position de prétendant au titre lors de la phase de groupe, la sélection espagnole a échoué avant les quarts de finale, comme lors des 2 dernières coupes du monde (élimination en poules en 2014 et 2018). Les espagnols ont buté pendant 120 minutes sur une équipe marocaine d’une solidité exemplaire et d’un talent offensif intéressant. Mais au-delà de l’adversité, les espagnols n’ont pas convaincu. Leur jeu ultra-possessif nous donne l’impression d’une volonté de retourner à une époque révolue, époque durant laquelle ils roulaient sur le monde. Mais alors comment expliquer la débâcle d’une Espagne que beaucoup voyaient favoris après le premier match ? Nous allons tenter d’y répondre…



Une Espagne nostalgique


Avec Luis Enrique aux commandes, la sélection espagnole semble avoir une envie de continuité, de prolonger ce style de jeu particulier qui a permis l’hégémonie internationale de la Roja de 2008 à 2012 (3 titres). Ce désir nostalgique peut se retrouver dans la présence d’anciens cadres (Jordi Alba et Busquets), d’une majorité de barcelonais (7) mais surtout d’une mise en place tactique rappelant celle de Del Bosque. Un milieu technique et talentueux, conservateurs de ballon avec la même plaque tournante nommée Busquets. L’absence d’ailiers purs et d’un buteur de métier rappelle sans aucun doute le replacement d’Iniesta ou David Villa sur un côté et le rôle de faux 9 endossé par Fàbregas en 2012. Si l’on ajoute à cela des défenseurs habiles balle au pied, on en vient rapidement au schéma de jeu d’antan.

Mais alors pourquoi la même recette ne prend-elle pas ? Car les ingrédients semblent différents…


Une impuissance offensive


La même recette ? Entre autres, à quelque détail près. Les mêmes ingrédients ? Loin de là.

La performance des espagnols contre le Maroc en a laissé plus d’un indifférents. « Ennuyeux », « On ronfle », « L’impression que l’Espagne pourrait faire tourner la balle pendant 7 jours… ». Voilà le type de commentaire que l’on pouvait observer sur les réseaux sociaux, et ça semble dur de les contredire. La Roja semblait, dès le coup d’envoi, essoufflée, en manque d’inspiration, d’idées. Avec précisément 1019 passes réalisées, les phases de jeu de possession semblaient se répéter, et ce pendant 120 minutes. Mais le réel problème qu’ils ont rencontré, c’est qu’ils n’ont (presque) jamais été dangereux. Mais alors qu’est-ce qu’il manquait ?


2012 vs 2022


Il est intéressant de prendre l’exemple de l’Euro 2012 pour mettre en évidence les potentiels problèmes de l’équipe actuelle. Sur cette compétition, les espagnols adoptaient le même fond de jeu, ultra-possessif. Ce sont alors les détails qui font la différence.

La première chose frappante entre 2012 et 2022 est la différence concernant la quantité de ballons perdus. Sur 4 matchs, le nombre de ballons perdus par l’équipe de Del Bosque s’élevait à 17 bp/pm. De son côté, l’Espagne de 2022 perd environ 28 ballons par match. On note ainsi une différence de 11 ballons perdus. Alors certes, la qualité des joueurs et leur expérience ne sont pas les mêmes, mais alors pourquoi vouloir imiter ce style de jeu ? Bien que la qualité technique de Pedri ou encore Gavi n’est pas à remettre en question, le milieu Xavi/Iniesta accompagné de Xabi Alonso et Busquets (prime) semble être l’un des seuls capables de conserver le ballon sous la pression avec une telle régularité. De plus, la différence de qualité technique est également visible dans les passes et plus précisément les passes clés. En 2012, la Roja tournait à 14,5 passes clés de moyenne contre 9 en 2022. On avait donc des milieux de terrain qui coupaient des lignes et distillaient de vrais caviars pour les attaquants, et ce sont ces passes déstabilisatrices qui ont manqué mardi. Mais ce n’est pas tout. En plus de perdre moins le ballon, les hommes de Del Bosque tentaient bien plus de choses balle au pied. Que ce soit dans les dribbles (9,5 d/pm vs 6 d/pm) ou dans les tirs cadrés (8 tc/pm vs 4,25 tc/pm), l’Espagne de 2012 était plus dangereuse, car sa sérénité la poussait à oser. Si le jeu espagnol dans cette coupe du monde nous paraissait monotone, c’était car il y a très peu eu (voire pas du tout) de variantes. Une statistique choquante entre les deux époques concerne celle des ballons en profondeurs. En 2012, la Roja envoyait en moyenne 15 ballons en profondeurs par match alors qu’en 2022 elle en envoyait… 3 ! C’est la stat qui témoigne le plus du manque d’inspiration et du jeu monotone et répétitif des espagnols.


Un manque de mouvement


Autre symptôme d’un système de jeu pas adapté à l’équipe, le déplacement des joueurs.

Sur l’image de gauche, nous pouvons voir la heatmap de Pedri et Gavi contre le Maroc. On remarque une position statique, les deux joueurs restent dans leur zone, figés. Moins de déplacement donc plus de prévisibilité, on ne cherche pas à surprendre l’adversaire et à déplacer le bloc adverse, mais juste à attendre l’erreur en faisant tourner la balle. A droite, la heatmap de Xavi et X. Alonso (occupant les mêmes postes) lors d’un match à l’Euro 2012. On ne remarque même pas que cela correspond à deux joueurs tant la zone occupée est équilibrée. Les joueurs bougent, proposent, déstabilisent afin de perturber l’adversaire.



Autre exemple similaire et plus frappant. A gauche, la heatmap de Ferran Torres et Dani Olmo contre le Maroc. Les deux ailiers se retrouvent comme isolés dans un système de jeu pourtant se concentrant dans l’axe. Ils ne bougent pas de leur côté tels de purs ailiers. En soit, ce n’est pas un problème lorsque l’on a des joueurs de côtés qui font la différence, provoquent, rentrent etc. Mais cela ne semble pas être le style de jeu de l’Espagne, alors pourquoi les faire jouer dans ce rôle ?

A droite, la heatmap d’Iniesta et David Silva (occupant les mêmes postes). Là encore, leur déplacement est visible à l’œil nu. On les imagine rentrer, chercher un appui à l’intérieur, switcher avec les milieux, proposer dans l’axe… Certes, ils n’endossent pas le rôle d’ailiers purs, mais ça semble être ce rôle plus « libre » qui fonctionne dans ce système.


Un avenir tout de même prometteur


Malgré cette nouvelle désillusion en coupe du monde, tout n’est pas à jeter dans cette équipe espagnole. On ne peut oublier la demi-finale de la Roja lors de l’Euro 2021 dans lequel ils s’inclinent face à l’Italie aux tirs aux buts. Avec de jeunes joueurs très prometteurs, le nouveau sélectionneur espagnol Luis de la Fuente (nommé après la destitution de L. Enrique) pourra sans doute aller chercher des trophées sur la scène internationale. Le développement de Pedri, Gavi, Olmo ou encore Balde peut prochainement faire le bonheur des espagnols. De plus, la retraite internationale de Busquets scellera définitivement la nostalgie de 2010, lui qui était le seul rescapé de l’aventure en Afrique du Sud. Reste à savoir si le jeu ultra-possessif et le « tiki-taka » espagnol perdurera…



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